Mince. On apprend que l’écologie n’est pas assez virile, et que ce serait un truc de bonnes femmes. On savait déjà que les riches détruisent la planète, mais les hommes ?

Eh bien oui, apparemment les hommes mangent plus, conduisent plus, fument plus et boivent plus. Ils consomment au final plus d’énergie, au moins en Grèce et en Suède selon une étude de 2009. Enfin en Grèce, c’est quand ils ont encore de quoi se payer l’essence et les cigarettes bien sûr.

Sur le terrain des recherches en sciences sociales, l’altruisme a été identifié comme une valeur qui conduit à un comportement plus favorable à l’environnement. Or l’altruisme serait plus souvent classé comme prioritaire pour les femmes, qui par ailleurs produisent aussi moins de déchets, recyclent davantage et de manière générale seraient plus « socialement responsables ».

Mais surtout, une étude récente parue dans le Journal of Consumer Research puis vulgarisée dans Scientific American, indique qu’en fait les hommes résistent aux comportements verts parce que l’écologie, ce n’est pas viril : « Ce n’est pas que les hommes ne se sentent pas concernés par l’environnement. Mais ils tendent aussi à vouloir se sentir macho, et ils ont peur que les comportements écologiques leur donnent une image féminine. »

Il ressort au passage que finalement, ce sont les hommes sûrs de leur virilité qui ont le moins de mal à être écolos. Hum hum, intéressant. Avis aux amateurs de profil psychiatrique de Donald Trump, son furieux déni climatique et son bouton nucléaire « beaucoup plus gros et beaucoup pus puissant »…

On explore ça, entre itronie, sens commun et décolonisation des imaginaires, dans ma nouvelle chronique sur Là-bas dont voici un extrait vidéo :

L’étude a été menée sur 2000 volontaires, américains et chinois et conduit à plusieurs conclusions :

– Un : les comportements « écolo » sont perçus comme plus « féminins ». Le sac en toile réutilisable par exemple serait un truc de filles, alors que le sac en plastique c’est un truc d’hommes. Ok, je ne vois pas bien le lien mais admettons.

– Deux : quand on demande aux hommes de se souvenir d’une fois où ils ont fait un truc écolo, ils se sentent plus féminins dans leur intérieur profond.

– Trois : ces mêmes hommes ont tendance, si ils se sentent placés dans une situation qui risque de les efféminer, à compenser pour se rassurer, avec des comportements anti-écolo. Par exemple, si on leur donne une carte cadeau rose décorée de petites fleurs, en leur disant d’acheter avec une lampe, un sac à dos et des piles, ils vont choisir les produits les moins écolos.

A l’inverse, avec une carte neutre, ils choisissent davantage les produits « verts ». Ce qui, finalement, démontre finalement une grande sensibilité… Et provoque une sorte d’effet rebond : les hommes compenseraient selon cette étude par exemple, d’avoir je ne sais pas, ouvert un compte au crédit coopératif par exemple, en allant non pas s’acheter un pull d’occasion et des tomates bio, mais en faisant compulsivement chauffer la carte bleue pour s’acheter un écran plat et un fusil de chasse. Par exemple.

Conclusion, il ne faudrait surtout pas donner l’impression aux hommes d’être trop féminins, sinon ils auront tendance à saccager encore plus la planète. Il faudrait donc « masculiniser l’écologie ».

Ainsi, si vous voulez récolter des fonds pour une association de défense de l’environnement, il vaut mieux opter pour un logo de loup hurlant en noir et bleu foncé titré : « Rangers sauvages » que pour un arbre vert clair s’intitulant « Les amis de la nature ». Regardez Sea Sheperd : un crâne, une fourche, deux dauphins certes, mais zéro panda.

D’ailleurs comme le fait remarquer Usbek et Rica qui a relayé l’étude en France, la majorité des chefs d’État qui se réunissent dans les Cop pour le climat étant des hommes, il va peut-être falloir songer à remplacer le mignon petit marteau en forme de feuille de la COP21 par un gros marteau à tête de taureau pour les rassurer sur leur virilité et qu’ils se bougent un peu.

Les commentaires donnent d’autres pistes : un jeu vidéo mettant en scène des éco-guerriers pour massacrer la tribu « Degrés » sur PS4 et Xbox 360 avec comme titre « Guerre mondiale du climat II : Restauration » , ou bien un sac en toile avec Poutine torse-nu à cheval imprimé dessus, une bicyclette qui fait un bruit de Porsche, un steak de soja en forme de bison… Bref, remettre un peu de testostérone dans tout ça.

Sauf que.

Au-delà du choix discutable des « comportements écolos » mis en évidence dans cette étude (la voiture hybride, le sac en toile, avec ça on ne va pas aller loin), ces études ne précisent pas quel est le métier de ces hommes, leur classe sociale, leurs propres intérêts.

Et on se souvient des diatribes en 2010 de Mme Badinter, héritière et patronne de Publicis, fustigeant l’écologie qui favoriserait le machisme, le retour à une «maternité naturaliste» – comprendre l’allaitement naturel – pour mieux vendre le lait en poudre de son client Lactalis.

Alors, la testostérone sauverait la planète mieux que la lutte des classes ? Je n’en suis pas convaincue… Mais dans le doute, pour sauver la planète, on peut toujours interdire l’Ibuprofène ?