Chronique de l’assemblée régionale du 28 janvier (Part 1)
Ah, le règlement intérieur, le régime indemnitaire, le florilège d’émission de billets de trésorerie, de commissions, de pourcentages et de prorata. Derrière une apparence très techno dans l’ordre du jour de cette session se cachent cependant des choses parfois très politiques. Prenons par exemple la baisse des indemnités d’élus de 10 % proposée par Laurent Wauquiez en gage d’exemplarité. Fort bien, vous vous dites. Pourtant à y regarder de plus près… Mais je vais trop vite. Reprenons au début.
9h50. La session démarre sur un vote sur l’urgence d’un rapport, un dossier qui nous a été envoyé en urgence hier : une aide de 1,2 millions d’euros à une entreprise auvergnate qui travaille en lien avec l’exportation de Rafale, dont le dossier est en attente depuis 2014 et qui verse des dividendes à hauteur de 1, 6 milliard d’euros tout de même. Voilà déjà au moins deux raisons de douter du caractère d’urgence de cette aide publique. Donc pourquoi cette précipitation ? Et pendant combien de temps va-t-on continuer à donner de l’argent public à des entreprises dont les profits vont directement aux actionnaires, sans leur demander aucune garantie de création d’emplois ?
Le PS intervient pour rappeler qu’il faut conditionner les aides aux entreprises en faisant référence à ST Microelectronics. L’hallu. Eux qui ont voté toutes les subventions alors qu’on prêchait dans le désert pour alerter sur le fait que les investissements iraient directement en Asie et sur les risques de suppressions d’emplois. Bingo. Sur Grenoble, ST annonce des suppressions de poste qui se monteraient, avec les redéploiements, jusqu’à 600 emplois. Et devinez quoi : l’action bondit en Bourse. Y a des fois où on préférerait vraiment se tromper…
Voir notre communiqué sur les annonces de suppression de postes à ST Micro (en pdf)
Le vote sur le caractère d’urgence de cette aode donne 142 pour, 33 contre et 13 abstentions. Mais ça patine un peu pour cette première expérimentation du pupitre et du vote électronique, certains postes patinent, on recommence donc le vote et cette fois ça donne 174 pour. Bon.
10h. Laurent Wauquiez annonce une économie de 8,7 millions d’euros par la baisse de 10% des indemnités des élus, sous couvert d’exemplarité : en gros, « si on demande des efforts aux habitants, on doit commencer par en faire nous ». D’acc. Mais quel est au juste l’effort qu’il fait lui, le député qui dépasse déjà le montant maximum d’indemnités par son cumul ? Pour information, le plafond est tout de même à 8.270 euros par mois, ce qui laisse de quoi voir venir (au-delà, on parle d’écrêtement et le trop plein va à la collectivité). L’indemnité d’un Député est environ de 5.500 euros et celle d’un Vice-président de Région aux alentours de 3.700 euros. A minima, et lui est Président de Région. Donc même quand il aura démissionné de son mandat de Maire, et même avec 10 % de baisse sur son indemnité d’élu régional, le revenu de Monsieur Wauquiez ne baissera pas. Pour le conseiller régional « de base » – exemplaire quant au non cumul de mandat – ce revenu mensuel passera en revanche à 1.700 euros. Et ce, sans durée légale de travail. Forcément ça doit plaire à Monsieur Wauquiez lui qui veut revenir aux 42 voire 45 heures hebdomadaires…
Notre groupe a demandé à Monsieur Wauquiez le tableau annexe des indemnités de chacun des élus régionaux, comme c’est notre droit. La réponse : celui-ci sera joint après le vote pour le contrôle de légalité. Au mépris du droit d’information des élus : on n’ajoute pas une information aussi importante après le vote ! JC Kohlhaas dans son intervention pour notre groupe cite La ferme des animaux de G Orwell en l’adaptant au contexte : en somme, avec Monsieur Wauquiez, tous les élus sont exemplaires, mais certains le sont plus que d’autres…
Laurent Wauquiez nous répond : « la question est simple, est-ce que nous nous appliquons à nous mêmes ce que nous demandons aux autres ? ». Euh… Mais on ne demande pas une baisse de 10 % des salaires nous, Monsieur Wauquiez ! Il nous assure également que la baisse de 10% s’appliquera également à lui-même, faisant mine de ne pas comprendre que même avec cette baisse son revenu cumulé ne bougera pas. Bref.
Surtout, la question demeure : où iront ces 8,7 millions d’économies ? Dans des portiques de sécurité devant les lycées ?
10h30. Après ce grand assaut de démagogie, on passe au règlement intérieur, donc. Quelques satisfactions, par exemple sur le fait de pouvoir constituer un groupe autonome à partir de 5 élus comme c’était déjà le cas avant, ce qui permet à chaque liste de premier tour de constituer son propre groupe et de disposer des moyens afférents : salle de réunion, attachés de groupe… Certaines listes du premier tour se séparent à cette occasion : le PRG (qui était avec le PS), l’UDI et le Modem (qui était avec Laurent Wauquiez) font chacun leur groupe. En tout, cela fera donc 8 groupes politiques au sein de l’assemblée.
Très peu d’amendements ont été déposés. Seul le Centre droit qui amende le règlement intérieur sur deux intitulés de commission, et nous : pour conserver les questions orales d’actualité, sur une question un peu technique de calcul des moyens des groupes, et sur le droit d’initiative citoyenne. Mais à propos de ce dernier vu ce qui s’est passé et l’importance du sujet, je crois que ça mérite un billet à part entière. J’y reviendrai.
12h30. On apprend que le vote qui devait intervenir en Assemblée plénière pour désigner les élus siégeant dans les parcs naturels régionaux et les commissions CDCI, interviendrait finalement en commission permanente. Le hic : suite à la réduction de cette commission permanente, la proportionnelle n’y est pas intégralement respectée, et en l’espèce ainsi on n’aurait donc plus aucun poste. Je devais siéger au parc du Vercors, ça risque fort de ne pas être le cas. Voilà.